CHAPITRE II :
GENERALITES SUR LA SCHIZOPHRENIE
I.
HISTOIRE DE LA SCHIZOPHRENIE
La description de la schizophrénie en fait une maladie
relativement récente puisque sa conceptualisation remonte à la seconde moitié
du XIXe siècle, bien que les symptômes aient été observés depuis bien plus
longtemps (28). Des accusations de sorcellerie, soutenues par
l’incompréhension et la crainte, ont pu conduire des schizophrènes vers les
buchers ou d’autres types d’exécutions. Tel pouvait être le sort réservé aux
malades. Ainsi, toute personne présentant des comportements anormaux, risquait
une fin funeste (12).
Le premier diagnostic de schizophrénie fut établi en 1809 par un
médecin français, Philippe PINEL. Par la suite, en 1860, MOREL chercha
l’étiologie organique de la pathologie et évoqua le concept de dégénérescence
mentale et la nomma « démence
précoce ». Ainsi la schizophrénie était une dégradation du cerveau à
l’origine des symptômes de la pathologie (12,16).
En 1895, KRAEPELIN définit la « démence
précoce » et c'est donc à cette époque que
les premiers symptômes positifs comme les hallucinations sont repérés. Puis
HECKER décrit la schizophrénie hébéphrénique où prédomine la symptomatologie
dissociative et déficitaire, avec une pauvreté ou une absence du délire
exprimé. Par la suite, KAHLBAUM précise la catatonie, comme un défaut de
mouvement pointant le déficit psychomoteur (12,16).
C’est en 1911 que BLEULER propose finalement le terme de
schizophrénie qui signifie esprit divisé (‘’SCHIZEN’’ fractionnement et ‘’PHREIN’’ esprit) (26).
Par la suite, en 1959, SCHNEIDER tente de spécifier les critères diagnostiques
de la schizophrénie. FREUD a traité la schizophrénie par la psychanalyse en la
décrivant comme une faiblesse dans le développement du moi. Il précisait que « la caractéristique essentielle de la schizophrénie portait sur les
changements dans les relations du patient avec son entourage » (12,16).
Ce n’est qu’en 1950 que les neuroleptiques
sont découverts. Ces molécules ont apporté de grands progrès dans la prise en
charge des schizophrènes. En effet jusqu’alors les thérapeutiques n’étaient que très limitées, se
réduisant principalement à l’isolement, et aux thérapeutiques physiques
(contentions, hydrothérapie) (12,16).
II. DEFINITIONS
La schizophrénie vient du
grec ‘’SCHIZEN’’ qui signifie « fractionner, cliver, fendre »
et ‘’PHREIN’’ qui signifie « pensée, esprit » (26). Il
n’existe pas une seule définition consensuelle de la schizophrénie, depuis
l’introduction de ce terme par E. Bleuler plus de quarante définitions de la
schizophrénie ont été proposées (27). Sa définition a changé par
rapport à son origine suite à l’évolution dans la compréhension de cette entité
psychiatrique et son extension à d’autres groupes (18).
Henri Ey et coll. définit la
schizophrénie comme une psychose chronique caractérisée par une désorganisation, plus ou moins
progressive de la personnalité psychique. C’est une psychose chronique qui altère profondément la
personnalité et qui se manifeste par une tendance profonde à cesser de
construire son monde en communication avec autrui pour se perdre dans une
pensée autistique (chaos imaginaire) (16).
L’absence de définition
rigoureuse n’empêche pas cependant la plupart de cliniciens de s’étendre
pratiquement sur le diagnostic de psychose schizophrénique qui est l’ensemble
de troubles ou dominent la discordance, l’incohérence ideoverbale,
l’ambivalence, autisme, les idées délirantes, les hallucinations mal
systématisées et profondes perturbations affectives qui évoluent vers un
déficit et une dissociation de la personnalité (16).
Notons que, quel que soit
l’auteur et l’école, trois éléments définitionnels sont à retenir (16) :
1.
La dissociation (spaltung) de la personnalité et non son dédoublement
2.
La présence de signes négatifs : émoussement affectif, apathie, asocialité,
déficit d’attention, aboulie, etc.
3.
La présence de symptômes positifs : délire, hallucinations, illusions
I.
EPIDEMIOLOGIE
Pathologie ubiquitaire, la schizophrénie
est retrouvée dans le monde entier ; elle est retrouvée dans toutes les
races et dans toutes les ethnies (28); Elle est répandue à peu près uniformément dans le monde
entier, dans les différentes cultures et couches sociales (18). On
estime à environ 1% sa prévalence mondiale (20) ; le nombre des
personnes souffrant de la schizophrénie dans le monde est estimé à 45 millions (35) ;
la schizophrénie est repartie également entre les deux sexes, elle touche
au même degré les hommes que les femmes et touche plus souvent le sujet jeune ; l’âge du
diagnostic se situe entre 15 et 35 ans, elle commence rarement au-dessous
de 15 ans et aussi après 45-50 ans (16). Mais il existe une
différence par rapport à l’âge de la
première manifestation. Les
femmes la déclenchent en moyenne 3 à 5 ans plus tard que les hommes, dont la
moyenne d’âge lors du diagnostic est d’environ 25 ans (48).
Malgré que
la schizophrénie ne soit pas une maladie du siècle comme
l’hypertension ou le diabète, elle occupe la 8e place des maladies
handicapantes les plus courantes dans la classe d’âge de 15 à 44 ans dans le
monde entier ; elle est la maladie psychiatrique qui coute cher pour la
société par sa prise en charge (48). L’espérance de vie de patient
schizophrène est en moyenne de dix ans inferieurs à celle de la population
générale, elle est corrélée à un risque de suicide dix fois plus élevé que dans
la population générale; au cours de leur vie 40 % des patients schizophrènes
tentent de se suicider et 10% se suicident (28). Le risque
du décès est
multiplié par 5
pour les hommes et 2,5 pour
les femmes. Mentionnons également
à cet égard que les schizophrènes ont aussi un risque accru de mourir de causes
naturelles (48).
En France plus de 600.000
personnes souffrent de la schizophrénie ; elle représente 20 %
d’hospitalisations psychiatrique ; chaque année deux nouveaux cas pour 10.000
apparaissent (6), les schizophrènes représentent 1% des dépenses
totales de santés (17). En Afrique l’on dispose que de peu de données
concernant la schizophrénie, sa prévalence hospitalière est estimée à 12,1 % au
Mali, à 4,5 % au Benin et à 4, 45 % au Burkina-Faso (36). Dans
notre pays, la République démocratique du Congo, on estime que sa prévalence est
à 1% (19); quant aux données concernant la ville de Lubumbashi,
aucune étude n’a été faite jusque-là dans ce sens.
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